A la fin du récit, La princesse qui a failli mourir, parvient à se détacher de son désir : "il se passa un assez grand combat en elle-même "; à l'issue de cette lutte, elle parvient à une forme d'amour spirituel et se rapproche de Dieu.
La passion est également condamnable dans la mesure où elle est cause de souffrances infinies. Ainsi, à l'exception de quelques brefs moments de répit, passés en compagnie du duc, la princesse apparaît sans cesse en proie aux tourments dans le roman de Mme de Lafayette.
I- LA CONDAMNATION DES PASSIONS AU NOM DE LA RAISONTous les philosophes classiques, de Platon à Kant, ont dénoncé avec ferveur les passions. Elles seraient mauvaises en soi, vicieuses, irrationnelles, etc. Il faudrait donc s'en débarrasser afin de vivre bien, de vivre une vie d'homme.
Consternée des marques de jalousie et de passion qu'elle a involontairement données à Nemours, elle se sent compromise à ses propres yeux, traîtresse à son mari et « honteuse de paraître si peu digne d'estime aux yeux même de son amant » (346).
Les deux personnages sont encore là, mais loin de la cour. À la sociabilité affichée du début s'oppose la retraite dans l'austérité, le silence puis la mort. Après une grave maladie la princesse décide de ne jamais revenir « dans les lieux où était ce qu'elle avait aimé » et se retire dans une maison religieuse.
C'est la morale qui dicte ses choix. Elle considère qu'une nécessité impérative s'impose à elle, ce qu'elle souligne par le ton déterminé qu'elle emploie. Le duc de Nemours oppose à la vertu le pouvoir de l'amour et contre-argumente en disant qu'il n'est pas possible de résister à l'amour.
Elle refuse les avances du duc de Nemours, bien qu'elle l'aime, par fidélité à la mémoire de son mari. La princesse de Clèves est un exemple de constance et de vertu. Ce roman a été lu par des femmes, dans le but de les mettre en garde contre les liaisons adultères.
Le fait de savoir s'il est vraisemblable ou non que la princesse admette à son mari qu'elle aime un autre homme devient une véritable controverse littéraire. Certains jugent ce comportement hautement vertueux et moral, d'autres condamnent une scène invraisemblable et amorale.
Plus tard, Mme de Clèves apporte une nouvelle preuve de ses sentiments au duc de Nemours, lorsqu'il est blessé au cours d'un tournoi. Mais ensuite, une lettre qu'elle intercepte lui laisse supposer que Nemours a une liaison. Elle découvre la jalousie.
La Princesse décide de ne pas aller au bal du Maréchal sous prétexte que celui-ci l'aime et veut en faire sa maîtresse (en réalité, elle ne veut pas y aller parce que Nemours n'y sera pas). Elle feint d'être malade.
Autrement dit, pour lutter contre la passion de peur, il ne suffit pas de penser qu'il ne faut pas avoir peur, il faut surtout penser à tout ce qui stimule en nous le courage. Tel est le principe d'une véritable technique de contrôle des passions.
Pour vaincre son amour maladif, l'idée générale est donc de gérer ses émotions au lieu d'être contrôlé par elles. Il s'agit de trouver son bonheur en soi sans le rechercher chez les autres !
Il faut surtout combattre nos passions au nom de la liberté : en effet elles nous conduisent à capituler, à s'abandonner à leur mouvement. Leur développement ne saurait s'effectuer sans une sorte de viol de la raison, qui perd alors sa fonction législatrice.
L'extrait choisi suit immédiatement une scène d'aveu particulièrement originale, que certains contemporains ont jugé invraisemblable : une femme avoue à son mari qu'elle en aime un autre pour qu'il lui permette de rester éloignée de cet homme, et donc de protéger leur mariage.
La passion se traduit en effet par un sentiment d'excitation inhabituelle alternant plaisir et souffrance du fait de la baisse importante de la sérotonine (neuromédiateur responsable de l'état émotionnel de bonheur) et de l'augmentation de la dopamine (neuromédiateur provoquant la sensation de plaisir) qui active le ...
Réputation et vertu sont les maîtres-mots de cette morale : il faut avant tout garder la maîtrise de soi-même et maintenir des apparences vertueuses. Cette morale est notamment incarnée par la mère de l'héroïne, Mme de Chartres.
La tension dramatique du roman se noue alors : la future princesse aura-t-elle suffisamment de ressources pour résister aux tentations de la Cour ? Suivra-t-elle l'éducation moraliste de sa mère une fois soumise aux dangers de la galanterie de la Cour ?
M. de Nemours rend visite à Mme de Clèves et lui apprend la demande au Vidame de Chartres. Il parvient également grâce au billet que lui a donné son ami à lui prouver qu'il n'est pas compromis dans cette aventure sentimentale. Il parvient ainsi à dissiper la jalousie de la Princesse.
Il se jeta alors à ses pieds et "s'abandonna à tous les divers mouvements dont il était agité; il lui fit voir, et par se paroles, et par ses pleurs, la plus vive et la plus tendre passion dont un coeur ait jamais été touché." Indice : on le voit pleurer à plusieurs reprises dans le roman .
La passion est une émotion fulgurante qui se traduit souvent par une attraction fusionnelle avec l'autre. Au contraire, l'amour est une attirance affective sans violence mais avec du respect et de l'attention. Vivre une relation amoureuse ou passionnelle peut donc avoir des conséquences très différentes.
Il englobe la tendresse, l'admiration, l'amitié et la réalisation de projets communs à long terme. Alors que la passion crée la dépendance, l'amour crée l'attachement : un sentiment d'affection et de sympathie. Deux personnes qui s'aiment se regardent, mais regardent aussi dans la même direction.
La passion naît d'une fêlure
Elle nait de la rencontre entre deux grandes fragilités, d'une attente qui repose sur un manque affectif profond et abyssal. Elle arrive dans les moments où ce manque est exacerbé. Elle donne une identité forte, une dimension existentielle fondamentale.
Elle meurt en couches à l'âge de 27 ans, en mettant au monde un neuvième enfant. C'est lors de ses fiançailles que, dans le roman de Mme de La Fayette, Madame de Clèves rencontre le duc de Nemours.
Le Prince de Clèves, ravagé par la jalousie, meurt de chagrin. Ébranlée par la mort de son mari, la Princesse de Clèves refuse de vivre son amour avec le duc de Nemours et se retire dans un couvent jusqu'à la fin de ses jours.
La société joue par ailleurs un rôle important parce qu'elle impose une morale à l'individu. La mère de la princesse de Clèves n'est pas seulement une confidente ou une alliée pour sa fille : elle fait aussi office de directeur de conscience.